Il faisait frais et humide quand un malheureux arrêt pipi s’est imposé (faute à la trop grande boisson avalée une heure auparavant à Williams) en bord de route près de la forêt. Nous sommes en T-shirt court, bermuda et claquettes, la mousse et les aiguilles de pins se faufilent entre nos orteils à chacun de nos pas.
Fabien au volant crie d’étonnement en pointant du doigt un tronc d’arbre tandis que je coure pressée de regagner notre voiture. « Un écureuil derrière toi ! »
Nous sommes arrivés dans la vallée de Sedona.
Un plan simpliste à la main, résultat d’un courrier papier en provenance de notre futur logement, j’indique la route à suivre. « Non ne prend pas la nationale, mais là, la petite à droite, la 89A, c’est ça ? » Déstabilisée par cette foret de pins et ces nombreux cours d’eau, je jette des légers regards un peu partout pour être sûr de ne pas rater une information primordiale nous permettant de rejoindre notre toit. Deux jours de désert sec et de températures bien au dessus de nos normales auront eu raison sur nous : c’est comme si nous roulions actuellement sur la lune ! Étrange…
La vision des trente minutes suivantes sera sous le même signe extraterrestre. Nous descendons doucement dans les entrailles de la planète et la route en lacet s’enfonce toujours plus bas. Et bien, quel accueil Sedona !
Et puis, par une sorte de panneau en bois écrit finement comme un message caché, en effet, caché par les branches des pins, le nom du lieu-dit est apparu furtivement. Tellement furtivement que nous avons continué tout droit puis fait demi-tour lorsque le doute fut trop grand. Le chemin indiqué par le panneau file visiblement plus bas encore dans un canyon. Dans un élan de panique, j’ordonne à Fabien de ne pas conduire sur cette route tant que je ne serais pas allée enquêter sur les conditions de circulation. Nous voilà planté avec notre voiture à seulement dix mètres de notre chalet… sans que l’on puisse à première vue y accéder.
Ayant pris le soin d’enfiler des baskets et un pull pour sortir, je pars en éclaireuse avec mon père. C’est bien ce que je craignais, le chemin passe par une petite rivière. Il est pourtant bien tracé et c’est le seul dans le secteur. Après confirmation de mon père, nous décidons de rouler (avons-nous seulement le choix ?). Et c’est ainsi que Fabien s’engagera pour sa toute première expérience de « roulage sur l’eau » au commande d’une voiture. Sueur froide ? Même pas ! Enfin je crois… demandez donc au concerné qui fera la manœuvre quatre fois par jour pendant trois jours !
Nous avions choisi de faire une pause dans notre road-trip pour profiter un maximum d’un parc en particulier. Notre choix s’est porté sur Sedona, une ville dont les critiques ne tarissaient pas d’éloges, et il s’avéra être non pas un parc mais toute une région regorgeant de surprises. Trois jours entiers sans avaler des kilomètres et des kilomètres, installés confortablement en pleine forêt dans un chalet loué. Ce logement tant attendu n’était pas arrivé tout cuit dans le bec. Situé dans le trou du c_ du monde apparemment, Fabien avait du passé nombre d’appels téléphonique aux gérants américain qui ne reçoivent que ça, la poste et des fax – je sais, c’est tellement moderne – pour faire notre demande de location. Demande de location nous ayant donné quelques sueurs froides quand un courrier en provenance des United Sates himself à deux semaines du départ en tour du monde nous informe que la réservation a été annulée. C’est le drame, Fabien saute du lit pour communiquer avec « Forest House » (notre gérant des locations de chalet à Sedona) et l’histoire se règle très vite. Ouf, on peut partir en voyage.
Notre chalet, l’Oak Creek House (photo ci-dessus) fut une excellente surprise et valait largement la peine que l’on se décarcasse ! La maisonnette est grande, propre, bien aménagée, chaleureuse et décorée avec goût. Nous avons rien que pour nous un salon, une cuisine américaine très moderne (allumer un micro onde requière beaucoup plus que l’obtention du bac) et deux belles chambres à l’étages. Oui, nous avons un étage et une grande façade en verre donnant sur la forêt ! Avec Fabien nous ne sommes plus habitués à autant d’intimité dans les coins dits « communs » (c’est comme ça que l’on appelle une salle avec chaises et canapés dans les auberges de jeunesse) et c’est un pur bonheur que d’avoir sa propre maison. « Je veux la même en rentrant ! » crie Fabien.
Nous avons aussi notre petit jardin et notre barbecue. Marre des pâtes à l’eau et des plats petits budget, on veut de la viande, de la vraie, vous comprenez ?!
Après un rapide tour à la chambre des commerces, tenue exclusivement par des bénévoles, nous sélectionnons différentes ballades dans le coin. Pas facile, ici, il y en a une bonne centaine pour tous les goûts et moyens de transports. Marche à pied, vélo, cheval ou jeep. Nous apprenons que la ville possède quatre énormes vortex parmi les plus gros au monde. Ne me demandez surtout pas ce qu’est un vortex, je n’en sais fichetrement rien ! J’imagine toujours des petits bonhomme vert et des soucoupes à antenne tordue, mais je pense me tromper. Les vortex, « Bell Rock », « Cathedral Rock », « Aeroport » et « Boyton » sont des immenses blocs de pierre rouge statique. Des ondes positives sont censés en être dégagé mais j’avoue que pas grand chose de palpable n’en est ressorti pendant notre séjour près d’eux… sauf leur stupéfiante beauté. Nous avons approché « Cathedral Rock » lors d’une marche en matinée.
La marche durera une heure autour d’un décor rouge vif parsemé de ci de là de quelques arbres verts. Un mélange reposant et agréable à l’oeil, le rouge aride mêlé au vert frais. Nous sautons de dalles de pierre en dalles de pierres tel des explorateurs du désert. C’est assez étrange, en France les sentiers de randonnées sont plutôt sur un chemin bien clair et surtout en terre. Les dalles arborent de nombreuse lignes courbées, creusées par le temps, d’un esthétisme remarquable.
Cathedral Rock nous dominera pendant toute la marche. Nous sommes comme attirés mystérieusement par ce bloc de pierre titanesque. Ainsi, malgré que le chemin rangé en catégorie « facile » tourne à droite, par un élan spontané, tout le petit groupe continuera tout droit afin de se rapprocher toujours plus du bloc (notre chemin initial se contentait de tourner autour comme un chien apeuré).
Le nouveau chemin s’avéra être court mais pas facile ! La pente est raide, nous suivons une faille creusée par un ancien court d’eau millénaire. Nous devons jouer des pieds et des mains pour avancer car chaque prise compte pour ne pas glisser. Tout le monde s’en sort à merveille malgré la chaleur.
L’effort sera récompensé par la vue sur toute la vallée. Le vortex est à seulement cinq mètres de nous, à vrai dire, nous sommes déjà dessus. Mais nous n’en parlerons pas. Nous sommes trop près cette fois pour l’admirer en entier. S’en suivra une longue pause du même temps que la randonnée, admiratifs du paysage.
La seconde randonnée sera tout aussi splendide mais beaucoup plus facile (quoi que le soleil tape bien aujourd’hui). Le terrain est plus plat. Nous marchons au beau milieu de pins, de yucca, de cactus et de figue de barbarie. Le sol est composé à cent pour cent de ces petits blocs de pierre comme la veille et de poussière rouge, on se croirait sur une plage de sable rouge. C’est très surprenant. On adore. Jacky filme, film, filme… A Sedona il finira sa première cassette.
Et une marche de une heure nous prendra presque le double à force d’arrêt pour photographier et contempler. Nous avançons avec des musiques pleins la tête, celles des westerns. Allez savoir ? Un cow boy va peut-être apparaître sur son cheval depuis cette pierre ? Un indien s’est peut-être installé derrière ce canyon pour son camp ?
Plus le temps passe, plus nous réalisons que notre imaginaire avait pris forme ici, c’est bien à Sedona que se trouve l’Ouest Américain.
Il nous aura bien fallu trois jours pour profiter de notre chalet paisible et des nombreux paysages de la région. Quoi que nous n’en avons fait que les un vingtième. Le samedi matin, nous avons beaucoup de mal à partir… C’est donc vrai, les ondes positives existent ici ?? Et même si nous n’y croyions toujours pas vraiment, il faudra pourtant l’admettre, à Sedona, on se sent vraiment bien. Un futur lieu pour notre retraite, c’est sur et certain!
Et quand vient l’heure de fermer la porte de l’Oak Creek House, de démarrer le moteur et de manger les premiers kilomètres, une chanson mêlée de guitare, d’harmonica et de claquement de doigts résonne dans notre tête. Nous cavalons sur cette route empruntée quatre jours plus tôt en arrivant, la magnifique route 89A, celle qui nous avait tant déstabilisée. La musique tourne en boucle à mesure que les paysages rouges défilent. Des noms nous viennent à l’esprit…
« 3:10 pour Yuma », « La flèche brisée » de Delmer Daves, « L’ange et le mauvais garçon » de James Edward Grant, « Billy the kid » de King Vidor, ces vieux western. Depuis notre fidèle destrier de fer, nous guettons l’apparition des fantômes de John Wayne, James Stewart, Clint Eastwood, et bien d’autres encore ! Car oui, c’est ici à Sedona que les grand noms du cinéma sont nés (on dénombre plus d’une soixantaine de western tournés dans la région).
Ya y’a y’a ! Jolly Jumper il faut y aller !
(Écoutez donc la musique du lien suivant en re-regardant quelques photos, ça change tout)
Et oui j’y étais …
Quel effort sous un soleil de plomb ! mais arrivée au sommet du bloc « the cathedral rock », quelle belle récompense …. mon cow boy adoré m’attendait , alors envolée la fatigue , et dans ses bras je contemple l’admirable vue qui s’offre à nous , la vallée de Sédona
Et les indiens ? Pas un à l’horizon ? Même pas une petite réserve au passage ? Je plaisante mais cela aurait été bien quand même pour tous ces cowboys solitaires…. Au fait il vous reste de la coca ?
Les indiens, on en verra à Monument Valley :
http://www.2ci2la.fr/un-canyon-peut-en-cacher-un-autre/
Au moment où tu as posté ça, cet article était déjà en ligne depuis cinq jours! Concernant la coca, on s’est empressé de la finir avant de quitter le Pérou : illégal partout ailleurs dans le monde, et le Costa Rica ne plaisante vraiment pas avec les plantes et sources de drogues! Tout ce qui nous reste, ce sont des traces dans le sang (pendant deux mois nous étions positifs aux tests de drogue) et dans les cheveux (mais vu la vitesse à laquelle je me déplume, dans quelques temps ça sera du passé…).
[…] assurément une ville à découvrir, comme le sont Las Vegas et toutes ces petites villes typiques (Sedona, Lee Vining…). Quant à leurs parcs nationaux… Ouah! Incroyables de beauté, de diversité, de […]