Il y a des routes dont la seule évocation fait jaillir des images, souvenirs ou culture populaire : la route de la Soie, la route de l’Amitié, la route 40, qui remonte du sud au nord l’intégralité de l’Argentine, traversant la glace, la steppe, le désert et tant d’autres paysages, la nationale 7, qui est presque une référence aux vacances, chantée par Charles Trenet, mais également la route 66, sans doute la route la plus connue au monde, qui est citée dans un nombre incalculable de films et séries, ainsi que dans certaines chansons (comme « (Get your kicks on) Route 66″ interprétée par Nat King Cole puis par de nombreux autres interprètes dont les Rolling Stones ou Depeche Mode, « Route 66 d’Eddy Mitchell, « Sur la route 66″ de Johnny Hallyday ou encore le groupe Téléphone), mais ça n’est pas le propos du jour.
Cette route, connue donc entre toutes, travers les États-Unis de Boston à Los Angeles, presque le pays entier pourrait-on dire. Et, heureux hasard, notre camping se trouve sur sa trajectoire! Mieux : nous avions même prévu d’y circuler, sur une portion conservée (et touristique, mais ça, on ne le saura que plus tard).
Après avoir passé une nuit au four et subi un faux départ, nous étions donc prêts à rouler, en direction de l’est ; nous quittions la Californie pour l’Arizona et cherchions la sortie appropriée, ce qui ne fut pas trop dur à trouver, la bande d’asphalte étant devenue tellement populaire que des indications « historic route 66″ sont plantées tous les cent mètres à l’approche de Kingman. Quelques kilomètre plus loin, nous voila engagés sur la voie, et, sans mentir, elle ne m’emballa pas tout de suite ; plate, triste et encombrée de camions, elle n’offrait même pas un paysage intéressant, coincée entre une vallée grisonnante, vaguement habitée par la présence de caravanes et mobiles-homes jetées ça et là, et un aéroport régional dont les avions devaient consommer plus de kérosène que la moyenne, quand on voyait le nombre de citernes par rapport au nombre et à la taille des aéronef mitoyens.
Toutefois, l’horizon nous offrira assez vite une nouvelle vision des choses : on s’arrêtera d’abord devant un ancien motel, recyclé en laverie (au beau milieu de rien, c’est assez étrange), décorée d’une manière tout à fait originale : un grand toit en partie arrachée par un « UFO » (Unidentified Flying Object ou OVNI en français), une sorte d’immense statue (non, non, pas un moai), des panneaux d’information retournés.
Après les photos de circonstance, nous repartons pour nous retrouver devant une ancienne (décidément, que d’ancien sur cette route!) station-service, transformée en musée (et boutique, évidemment), avec ses plus ou moins vieilles pompes, ses véhicules abandonnés des années 50 ou avant, rouillant tristement en attendant d’être remplacées par des véhicules dans des états plus glorieux, son garage rempli de bric et de broc. A l’intérieur, c’est une ode à la gloire des années 50-60 qui nous accueille, des photos des stars de l’époque tapissant les murs, des banquettes de drive-in sur les côtés, le juke-box brillant de tous ses néons, Elvis Presley dominant le fond sonore. Les souvenirs vendus, d’ailleurs, s’accordent tout à fait au cadre en proposant de nombreux bibelots rappelant cette époque bénie (enfin surtout pour le possesseur de stations-services sur cette route, cette dernière étant essentiellement suivie par les touristes de nos jours…).
Le temps qu’un orage passe et nous sommes dans la voiture, dans la direction de Peach Springs, qui a un nom qui éveillera aux amateurs de films d’animation quelques remarques (le film « Cars, 4 roues » de Disney/Pixar se déroule à Radiator Springs).
La ville offrira toutefois un divertissement intéressant, qui ne se limite pas aux nombreux et incroyablement grands trains qui circulent fréquemment sur la voie ferrée à proximité.
Nous y déjeunerons, à l’abri d’une pergola, puis avancerons un peu avant de brusquement faire halte devant une reproduction d’une partie de ville du Far West, ainsi que plusieurs boutiques sympathiques, reprenant d’anciens véhicules à la sauce « Cars » et décorant les murs de façon humoristique.
Quelques photos sont prises avant de continuer le chemin vers notre destination des quelques jours à venir : Sedona ; mais avant d’y arriver, nous prévoyons un dernier arrêt, dans la petite ville de Williams. Et là, quelle surprise! Williams est comme le moustique coincé dans l’ambre, resté bloqué dans un état de parfaite conservation, dans les années 60 elle aussi (la ville, pas le moustique). Constituée d’une rue en grande partie, où tous les bâtiments sont alignés, on ne compte pas le nombre de boutiques de souvenirs mais aussi les chapelleries de cow boys, les boutiques pour aliens et tant d’autres. Mais elle possède encore son restaurant typique de l’époque avec ses grandes fresques murales et la décor (kitsch), ses saloons, ses lampadaires qu’on croirait à gaz, ses façades victoriennes en bois et… un train à vapeur (à la retraite)! Alors, on fait les fous autour (interdiction d’aller dessus, mais il est tout de même en meilleur état que ceux d’Uyuni, en Bolivie) Élodie, essaie d’en finir avec la vie (raté), on passe du temps dans les boutiques, on croise des jeunes en santiags et avec le chapeau, on ne résiste pas au plaisir d’aller boire un verre (un whisky, sec! un « fountain drink » si grand qu’on a du mal à finir le verre avant de se voir proposer de le remplir de nouveau!), on voit des motards avec le jean et la veste en cuir sur l’épaule, les lunettes noires ajustées, les tatouages développés et l’indispensable barbe de circonstance!
On repartira le soir vers Sedona, ravis de cette journée ni trop fatigante ni trop courte, avec plein de nouvelles images en tête, l’Amérique telle qu’on peut se la représenter : Élodie me corrigera même plusieurs fois, lorsque je déclarait : « C’est comme à Disney, sur Main Street » et qu’elle me répondra « Non, Disney c’est comme ici, c’est le parc qui est une bonne reproduction de la ville, pas l’inverse! », ce en quoi elle n’a pas tord.
Certaines villes de l’ouest Américain luttent pour conserver une atmosphère précise, Williams y arrive, tout comme les différents lieux que nous avons croisé sur cette portion de l’ « historic route 66″, atmosphère qui transpire maintenant en nous, qui nous évoque des souvenirs bien ancrés de cette bande d’asphalte, à chaque fois que nous entendons le King chanter…
coucou, NOUS SOMMES TOUJOURS SUR VOS PAS, DE VRAIS POTS DE COLLE, ATTENTION NOUS VOUS SURVEILLONS DE PRES