Retour à Bangkok, retour à la réalité. Nous atterrissons avec une heure de retard à l’aéroport. Nous nous faufilons sagement à la fin de la très longue file d’attente pour les taxis. L’air est moite et étouffant, bien plus qu’au bord des plages, et tout le monde est fatigué, nostalgique, impatient de regagner l’hôtel. Oui, je dis bien « hôtel » car Fabien et moi sommes surexcités à l’idée de découvrir notre cadeau de Noël offert par mes sœurs. Pour cette fin d’année, nous avons le droit à deux nuits dans un complexe haut de gamme ! Cela ne nous était encore jamais arrivé ! Notre hôtel est visible des quatre coins du centre Bangkok et il n’a pas de mal : il est composé de trois grandes tours de trente étages chacune. Vous imaginez le nombre de chambre ?? Vous imaginez le nombre de portiers à notre service ?
C’est la bouche grande ouverte que nous marchons, presque sur la pointe des pieds pour ne pas salir la douce moquette ni le parquet ciré. Nous arpentons les immenses couloirs, passons par le bar, les nombreux restaurants et LES piscines. Aux onzième et douzième étages, en effet, il y a deux grandes piscines sur le toit avec vues imprenables sur toute la ville. C’est beaucoup pour nous deux… merci pour ce cadeau original et inattendu. Ça change de la chambre décrépie au néon grésillant, aux parois fines laissant échapper quelques cris des voisins et à la petite salle de bain commune, toujours occupée quand il y a urgence, tout au bout du couloir. Les lits moelleux du Prince Palace nous emporteront dans un doux sommeil.
Pour dormir sur nos deux oreilles.
Et c’est tant mieux car le lendemain, visite de la ville.
Au début, nous avions tous souhaité découvrir l’immanquable Grand Palais. La Thaïlande est un de ces nombreux pays a encore avoir un roi et ici, quel roi ! Son visage est représenté de partout, tantôt (souvent en fait) jeune, tantôt plus âgé. Il a ses affiches placardées tous les cinq cents mètres à chaque coin de rue, sur les murs, les poteaux électriques, les grands buildings, les arbres, les ponts, bref de partout. Évidemment l’affection du peuple thaïlandais envers son roi est grande. Gare aux étrangers proférant un seul mot de travers sur la famille royale, même sur l’horrible dernière coiffure de madame (je n’ai pas dit que sa coiffure était horrible). Ce serait vraiment mal vu et passible d’un petit tour au commissariat. Je plaisante à peine ! Et ne vous amusez pas à rattraper un de vos précieux billets de banque tombé par inadvertance avec votre pied ! Le roi a sa représentation sur chaque et vous l’avez deviné, ce geste est très mal vu. Nous avons entendu dire qu’un étranger se serait même fait expulsé pour avoir piétiné le roi…
Mais je m’égare. Direction le Grand Palais, l’ancienne résidence du roi (son trône officiel est en périphérie de la ville)… où nous déclinerons sagement notre visite avec regret. Mais impossible pour Fabien et moi de dépenser 500 bath chacun (12,50€) alors que notre guide de voyage, pourtant récent nous l’indiquais à 250.
La Thaïlande assume totalement le maintien de son économie grâce au tourisme et comme d’habitude, c’est les voyageurs qui en pâtissent. Nous n’avons plus un sou. Demandez donc à Olivia et Thierry, je rechigne méchamment à sortir 40 bath… ! Ce pays a réussi à dévorer totalement notre budget, pourtant rehaussé à cause de l’approche des fêtes (et de la venue ô combien forte du tourisme à ce moment là). Tout est parti dans les îles, les plages, les excursions quotidiennes et les beaux logements. Nous avons liquidé en trois semaines ce qu’il nous faudrait pour vivre pendant cinq semaines au Cambodge ou au Vietnam. Nous nous rabattons donc sur le très connu Wat Pho, incontournable lui aussi car renfermant un des trésors les plus connus de Thaïlande dans le reste du monde, le…
De nombreux thaïlandais viennent chaque jour au pied de l’immense bouddha faire des prières et des offrandes ; une forte communauté asiatique aussi, chinois, japonais, vietnamiens, coréens. L’ambiance dans la pagode est particulière, à la fois silencieuse, respectueuse et électrique à cause des nombreux clic d’appareils photo. La statue en or est mitraillée sous tous les angles, des centaines de fois par minute. La pièce, pourtant sombre, est allumée par les flashs. Et malgré la foule présente ici où on aurait tendance à croire devoir jouer des coudes (comme dans la cité interdite de Beijing), non, il règne une atmosphère de légère surexcitation paisible et harmonieuse ; à l’image de ce pays, la Thaïlande. La découverte de cet immense bouddha fut intense.
Le Wat Pho ne réserve pas que cet merveille, le temple est vaste. Composé de nombreuses autres pagodes, stupa et des centaines de sculptures. Il nous retiendra deux heures à observer chaque détail, chaque statue, chaque dégradé de couleur. Je m’amuse souvent à dire que les thaï font un peu dans le kitsch en comparaison de son voisin la Chine ! Mais force est de constater que le Wat Pho est très photogénique. Un temple de plus dans notre longue liste depuis six mois… toujours agréable à visiter (et je ne savais pas à quoi je m’aventurerai plus tard).
L’Asie est riche en temple, pagode et représentation du bouddha. C’est un autre univers qui nous laissera souvent pensifs et interrogateurs. Nous aimerions tellement mieux le comprendre plutôt que de rester planter comme de simples observateurs ébahis par des dorures et des peintures.
La journée à Bangkok passera beaucoup trop vite. Je n’ose l’exprimer, ni même Olivia, mais nous redoutons terriblement la journée du lendemain. Ce sera le signe que notre petit rêve thaïlandais entre sœurs se termine.
Nous passerons notre dernière soirée, étrangement, à Chinatown. Bangkok est une ville à l’origine chinoise, rien de surprenant donc d’apprendre que la moitié de ses habitants auraient un parent d’origine chinoise. Ce Chinatown là aura quelque chose que le reste du monde n’a pas (c’est vrai ! vous ne vous êtes jamais demandé pourquoi toutes les grande ville du monde ont un Chinatown ?? New York, San Francisco, Lima, Séoul, Sydney, Singapour, Kuala Lumpur, San Jose du Costa Rica… d’accord c’est pas une grande ville celle là). Celui de Bangkok a un vrai goût de la Chine et un côté très populaire assez agréable. Ils ne nous trompent pas les habitants de la capitale Siam, la Chine est belle et bien ici dans ces quelques rues du centre ville. Nous dînerons autour d’un bon canard laqué, spécialité de Beijing, à nous remémorer nos aventures récentes au bord des plages. Comme si ce que nous avions vécu, nous l’avions à moitié imaginé…
L’heure de se coucher arrivera malheureusement. Un silence lourd règne dans la chambre tandis que chacun prépare sa valise. On s’assiéra dans notre canapé. On rigolera sur bien des bêtises. Comme des enfants, on cherchait des excuses pour ne pas se coucher.
Mais il est minuit, il est tard. Il faudrait pourtant. Olivia et Thierry mette le réveil le lendemain à six heure du matin.
On se dit un simple bonne nuit, comme de rien n’était et que demain serait un jour normal, ponctué de nombreuses activités fantastiques. En tout cas, on cache nos sentiments une fois de plus. Arrivée dans mon lit, je décide soudainement « Fabien, on se lève en même temps que eux demain et on prend le temps de déjeuner avec eux ! ». Bonne nuit.
Le lendemain, 7h du matin, ils sont prêts et il est l’heure de partir. Un taxi est vite interpellé au pied de l’hôtel. Thierry grimpe dans la voiture après un échange joyeux de sourires et de bises avec nous.
Je me retrouve là sur le trottoir, plantée, avec ma soeur. Tout s’enchaîne très vite. On se jette dans les bras l’une de l’autre. Pas d’applaudissement de nos voisins cette fois. On ne se lâche pas, on se dit des tas de choses dans l’oreille.
Il est l’heure.
Olivia me tourne le dos.
Mais dans un brusque élan, je coure derrière elle pour lui dire au revoir, une nouvelle fois. On a un peu de temps, tu ne crois pas ?
Ces moments là ne sont jamais faciles. On croit que l’on va être fort et puis il n’en est rien.
Je n’aime pas les au revoir.
Une personne que l’on aime s’en va. On sait que la vie continue, qu’on la reverra. Mais pourtant, on est si bien avec elle. Pourquoi lui dire au revoir ?
Agir ainsi, n’est-ce pas lui dire simplement que l’on tient à elle ? Pourquoi se freiner ?
Nos aventures thaïlandaises ont été fantastiques. Des plages de rêves, des gens accueillants, beaucoup de belles choses à découvrir. Mais je crois que sans ma sœur et Thierry à nos côtés, cela n’aurait pas été pareil…
31 Janvier 2012, il est minuit. Nous lâchons notre lampe en papier vers le ciel. Elle rejoint les centaines d’autres déjà présentes. Le ciel est plein d’étoiles et de rêves ce soir là. Cette fois, je suis sûre, ces fêtes de fin d’année sont uniques.
superbe et touchante la dernière photo , elle exprime à elle seule l’immense plaisir de retrouvailles de deux soeurs …..
vous êtes rayonnantes !
Merci !
JJ Goldman chante si bien : « si ça fait mal c’est que c’est gagné » ! On entend souvent dire qu’il faut savoir laisser partir l’autre pour mieux se retrouver ensuite et vivre des retrouvailles intenses, ah c’est bien jolie tout ça mais la famille « Morisson » ne l’entend pas vraiment ainsi… Que c’est dur d’être submergé par autant d’émotions, je crois que l’on peut dire autant d’amour ! Merci soeurette et Fabien pour tous ces moments partagés avec vous, merci douce Thailande pour tous ces merveilleux paysages gravés dans nos mémoires !